16 janv. 2014 Marseille (France)
Spécificité et robustesse de la « vigilance proprioceptive » durant la préparation motrice d'un pas : étude des potentiels évoqués somatosensoriels corticaux
Anahid Saradjian  1@  , Normand Teasdale * , Jean Blouin * , Laurence Mouchnino * @
1 : Aix-Marseille Université  (LNC)  -  Site web
CNRS : UMR7291
3, place Victor Hugo 13331 Marseille -  France
* : Auteur correspondant

INTRODUCTION

Nous avons mis récemment en évidence au niveau cortical l'existence d'un phénomène de facilitation sensorielle durant la préparation motrice d'un pas. Cette facilitation sensorielle pourrait témoigner d'une « vigilance proprioceptive » liée aux besoins de la tâche, et serait dépendante des contraintes d'équilibre (Saradjian et al. 2013). Le but de cette étude est de déterminer si cette modulation des potentiels évoqués corticaux serait spécifique à la proprioception (fibres afférentes Ia) ou serait généralisable à d'autres afférences somatosensorielles, renseignant également sur la position du corps. Pour ce faire, nous avons comparé les potentiels évoqués par une vibration musculo-tendineuse bilatérale appliquée aux chevilles (Stimulation des afférences Ia) à ceux générés par une translation du support (Stimulation cutanée et/ vestibulaire). Nous avons également testé la robustesse de cette facilitation proprioceptive en utilisant deux stimulations successives, la première stimulation étant connue pour atténuer la réponse évoquée de la seconde. Nous avons donc fait précéder de 250 ms la translation par rapport à la stimulation proprioceptive.

METHODES

Nous avons enregistré sur 10 sujets, les potentiels évoqués au niveau des aires somato-sensorielles générés par la vibration des chevilles (condition Vibration) ou par la translation latérale (condition Translation) ou par une stimulation combinée (condition Translation-Vibration). Le stimulus vibratoire de petite amplitude (1.2mm) et de hautes fréquences (80hz) permet de produire des micro-étirements du fuseau neuromusculaire pouvant être interprétés par le cerveau comme résultant de l'étirement du muscle. La translation du support quant à elle, provoquait un étirement de la peau sous le pied et une stimulation très vraisemblable des corpuscules de Ruffini sensibles à l'étirement de la peau. Les potentiels évoqués par ces techniques permettent d'évaluer la transmission sensorielle qui atteint le niveau cortical. Ces stimulations étaient appliquées durant la préparation motrice d'initiation d'un pas vers l'avant (tâche «Mouvement») ou pendant le maintien d'une posture érigée et stable (tâche «Posture»). Le sujet avait pour consigne d'initier le pas suite à un signal sonore (correspondant à la fin de la vibration pour les conditions Vibration et Translation-Vibration). Ces 3 conditions étaient présentées de façon pseudo-aléatoire. Nous avons analysés l'amplitude et la latences des potentiels évoqués par les différentes stimulations.

 RESULTATS ET DISCUSSION

Les résultats montrent une onde négative précoce P1-N1 qui signerait un premier traitement sensoriel des afférences qui est suivie par une onde négative soutenue qui pourrait représenter des mécanismes d'intégration de différentes afférences sensorielles.

Pour la condition Vibration l'amplitude et la latence de la composante précoce de l'information afférente au cortex sensorimoteur (onde P1-N1) ne présente pas de différence statistique alors que l'amplitude de l'onde négative qui suit (composante tardive) est significativement plus importante lorsque les sujets s'apprêtent à faire un pas (Tâche "Mouvement") comparativement à la tâche "Posture". En revanche, dans la condition Translation, les composantes précoces et tardives ne présentent pas de différences tâche- dépendantes, suggérant que la facilitation est propre à la modalité proprioceptive. Dans la condition Translation-Vibration, la composante P1-N1 du potentiel évoqué est atténuée et retardée par rapport à la condition de Vibration seule, comme attendu dans le cas de deux stimulations successives. Malgré l'atténuation du potentiel évoqué précoce, une facilitation de la composante tardive lors de la tâche "Mouvement" reste observée.

CONCLUSION

L'ensemble de ces résultats suggèrent la présence d'au moins deux processus somatosensoriels distincts: le premier étant dépendant de la volée afférente et indépendant du contexte ("Posture" et "Mouvement") et le second, pourrait représenter un stade tardif de traitement dans l'intégration sensori-motrice. Ce processus tardif procurerait de l'information lorsqu'elle est pertinente pour la tâche à réaliser (vigilance proprioceptive) et permettrait la mise en place des conditions d'équilibre avant l'exécution du pas. Ces 2 processus sensoriels pourraient avoir des origines corticales différentes en lien avec les rôles des cortex somatosensoriels primaire (S1) et secondaire (S2).

BIBLIOGRAPHIE

Saradjian AH, Tremblay L, Perrier J, Blouin J, Mouchnino L (2013). Cortical facilitation of proprioceptive inputs related to gravitational balance constraints during step preparation. J Neurophysiol. doi:10.1152

 


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